Transport du gaz naturel
Le gaz naturel est la troisième source d’énergie la plus utilisée dans le monde après le pétrole et le charbon et une des moins polluantes en termes d’émission des gaz à effet de serre (GES). Plus de 30 % de la production mondiale est assurée par le continent européen. L’acheminement du gaz naturel à travers l’Europe se fait par l’intermédiaire d’un réseau de transport de plus de 50 000 kilomètres dont la propriété est partagée entre différentes compagnies gazières européennes. Dans tous les pays, la distribution du gaz est assurée aux clients (industriels, compagnies de distribution) par l’intermédiaire d’un poste de détente. A l’occasion de cette opération, un dépôt solide peut apparaître et compromettre la sécurité des installations.
Les études menées au LaTEP et en particulier la caractérisation thermodynamique ont permis une meilleure compréhension du phénomène.
L’étude bibliographique sur les différents dépôts pouvant exister dans le gaz naturel a rapidement permis d’identifier le soufre. Trois hypothèses de formation sont apparues possibles : la réaction chimique, les condensats et la désublimation. L’emplacement précis du dépôt après la détente, son absence en amont, le temps de résidence extrêmement court, autant d’informations qui indiquent que la formation du soufre solide n’est pas le résultat d’une réaction chimique contrôlée par une cinétique. Les hypothèses de formation qui reposent sur la formation de condensats et la désublimation du soufre sont apparues comme les plus probables. Nous avons alors utilisé la caractérisation thermodynamique du système en approche pour étudier les différentes hypothèses de formation du soufre solide. La description de la fugacité solide du soufre était un point bloquant. Nous avons alors établi un chemin thermodynamique original nous permettant d’y avoir accès en toute rigueur. De même, la gestion numérique de l’apparition des phases a été en pratique un point sensible pour nos modèles. Nous avons utilisé une approche algorithmique originale qui nous a permis de gérer automatiquement l’apparition ou la disparition des phases.
Dans nos domaines d’intérêt en pression et température, les données expérimentales de solubilité du soufre dans une phase gaz disponibles dans la littérature étaient rarissimes pour ne pas dire inexistantes. Les coefficients d’interactions binaires de l’équation d’état ont donc été régressés à partir de données expérimentales obtenues dans des domaines nettement plus hauts en P et T que ceux d’application. Pour pallier ce manque de données, nous avons initié dès 2005 la conception et le développement d’un pilote expérimental pour étudier la solubilité du soufre, d’abord dans des binaires gazeux (obtention des paramètres d’interactions binaires) pour ensuite étendre l’étude à des gaz de composition plus complexe. Le pilote est aujourd’hui dans une configuration optimale qui nous permet d’obtenir expérimentalement des données de solubilité du soufre dans le méthane jusqu’à des pressions proches de la pression atmosphérique.
Nous sommes actuellement parmi les rares laboratoires à avoir ces compétences au niveau mondial. Nous souhaiterions maintenant étendre la composition du gaz étudié à des systèmes gazeux comprenant du H2S. Un laboratoire adapté à la manipulation en toute sécurité de ce type de composé est actuellement en projet au sein de l’UPPA et de la fédération IPRA.
Les compétences acquises, que ce soit en modélisation ou en expérimental pour la caractérisation des systèmes complexes, nous ont permis récemment de les appliquer avec succès au domaine des géosciences comme le domaine du stockage du CO2 ou de la géothermie profonde avec par exemple l’étude de la solubilité des gaz dans les saumures sous haute-pression.