Échelle réseaux de distribution de l'énergie

Les réseaux multi‐énergie sont conçus comme un assemblage de briques technologiques (centrales solaires thermiques, réacteur de méthanation, unités de méthanisation, pompe à chaleur, machine à absorption, échangeurs de chaleur avec différentes technologies, électrolyseur, stockage, etc.).

Depuis plusieurs années, une des activités du LaTEP tend à évoluer vers les problématiques de modélisation et d’optimisation dynamiques des réseaux multi‐énergies avec des sources primaires variées (fossile, solaire, biomasse…) et des vecteurs différents (chaud, froid, gaz, CO2, électricité…). Il est en effet particulièrement pertinent d’aller vers l’étude dynamique de ces systèmes énergétiques où la demande est variable et où les sources peuvent être intermittentes. Cette activité se base sur des compétences acquises au cours de ces dernières années en modélisation, simulation et optimisation dynamiques appliquées à certaines de ces briques technologiques (réseau de chaleur, machine à absorption, méthanation, par exemple). Le développement de nouvelles briques signalées précédemment permettra d’élargir le champ des solutions technologiques. Ce travail vise aussi à capitaliser l’ensemble de ces briques pour proposer la mise au point d’outils logiciels d’aide à la conception et au pilotage de réseaux multi‐énergie. Les premiers projets de ce type sont en cours avec des partenariats industriels et/ou institutionnels. Notamment, un projet avec la société Teréga (IMPULSE 2025), en partenariat avec l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) est en cours. Dans ce projet le power-to-gas est une thématique importante. Cette même thématique est également centrale dans les projets OPTIGAZ et OPTIMETH déjà évoqués : il s’agit d’optimiser dynamiquement des plateformes mettant en œuvre l’électricité renouvelable excédentaire dans un système énergétique incluant : électrolyse de l’eau – méthanation –méthanisation ou gazéification – purification du gaz obtenu pour réinjection sur le réseau. Le projet OPTIGAZ se fera en collaboration avec le professeur Moises TELES de l’Université de Sao Paulo. D’un point de vue méthodologique, il est également prévu d’aller vers des optimisations dynamiques en variables mixtes (MIDO) afin d’optimiser simultanément la structure du système énergétique et les profils temporels des paramètres opératoires (projet RESEAUCONCEPT en cours avec l’ITE NOBATEK/INEF4). De plus, après l’optimisation en régime permanent (qui se poursuit avec l’université catholique de Louvain et qui pourrait déboucher sur un projet de thèse, cette fois-ci en dynamique – programme EDENE[1]) et l’optimisation dynamique présentées ci‐avant, il est prévu d’aller vers des stratégies d’optimisation « temps réel » (des systèmes multi‐énergies donc). L’optimisation en temps réel se situe entre le niveau planification (optimisation dynamique) et le niveau contrôle (en boucle fermée). Elle permet, grâce à des mesures en ligne de tenir compte des perturbations liées à l’environnement (ensoleillement par exemple) et, après une étape de validation et d’identification, d’ajuster certains paramètres numériques du système (caractérisant l’encrassement des échangeurs par exemple ou le vieillissement d’un catalyseur…), afin de corriger les prévisions de la planification. Dans le contexte des systèmes multi‐énergie mettant en œuvre des sources intermittentes, une telle approche est tout à fait novatrice et pertinente. Une thèse concernant l’optimisation en temps réel d’une centrale solaire thermique a débuté en collaboration avec le Pr G. A. Carillo Le Roux de l’Université de San Paulo, spécialiste de ce type d’optimisation. Une autre thèse incluant plusieurs productions dont le solaire thermique pour répondre à la demande en chaleur d’acteurs industriels ou de réseaux de chaleur urbain a également démarré avec la société NewHeat. Enfin, la collaboration initiée avec TOTALEnergies pour l’analyse exergétique et l’optimisation dynamique des puits de production se poursuivra dans un projet plus ambitieux incluant plusieurs sources dont les hydrocarbures, mais avec un objectif de zéro émission. Il est à noter que dans ces optimisations dynamiques, les critères peuvent être énergétiques (exergétique), mais aussi économiques ou environnementaux (minimisation d’émissions).

Une autre approche concernant les réseaux multi‐énergies mise en œuvre au LaTEP, est la supervision des réseaux multi-énergies avec l’approche DSM (Demand Side Management). C’est un changement de paradigme qui vise à utiliser au mieux l’existant. C’est une approche intégrale, couplant concepts théoriques et applications concrètes, pour le développement de stratégies de supervision opérationnelle et de gestion des réseaux multi‐ énergies intelligents. La démarche est fortement transdisciplinaire et laisse une place prépondérante aux collaborations avec des disciplines telles que l’Informatique, le Droit et l’Économie. Cette approche a déjà été initiée dans le cadre du projet CAPEESH « Combined Analysis for Physical and Economical management of Energy Systems for Housings» co‐financé par la région Nouvelle Aquitaine. Une analyse combinée physico‐économique du contrôle (gestion et supervision) de réseaux multi énergies (chaleur, électricité, etc.) pour les « consommateurs » à l’échelle d’un quartier, d’une ville, a été abordée au cours d’une thèse. Les composantes économique et juridique sont intégrées.

L’amélioration du fonctionnement de ces systèmes nécessite par ailleurs un contrôle dynamique. Le développement de compétences complémentaires en métrologie avec l’IoT (Internet of Things ou objets connectés), mais également dans les techniques d’apprentissage artificielles (prédiction à court terme) est donc nécessaire. Il se met en place au travers d’INTIOME « Intégration de l’Internet des Objets dans le Management de l’Énergie », un projet en collaboration avec des informaticiens, mais qui s’appuie aussi sur l’expertise développée dans le cadre des projets SIQINIQ (« Développement de serres horticoles au Nunavik » dans le cadre du Labex DRIIHM). Ces travaux ont conduit au développement d’un outil informatique PEACEFULNESS « platform for transverse evaluation of control strategies for multi‐energy smart grids », qui permet à la fois la gestion opérationnelle de réseaux multi‐fluides, mais aussi leur simulation afin d’explorer de nouvelles pistes de management ou de tester de nouveaux scénarios. Plusieurs capteurs autonomes ont également été conçus, développé et installés. Enfin, signalons que dans le cadre du laboratoire commun ITE Nobatek-INEF4, un projet couplant l’intelligence artificielle (IA) et les réseaux démarrera l’année prochaine en partenariat avec le Laboratoire Bordelais de Recherche en Informatique (LaBRI).

Finalement au niveau des réseaux multi-énergies, le LaTEP continuera à développer des travaux concernant la supervision intelligente (avec l’approche DSM) et l’optimisation dynamique de ces réseaux tout en allant vers des outils tels que l’Intelligence Artificielle, l’optimisation en temps réel, l’IoT. Ces outils seront en effet incontournables pour aborder, demain, le pilotage intelligent des réseaux énergétiques (gaz, électricité, chaleur…) qui seront tous connectés les uns aux autres. Une ambition importante concerne également la capitalisation de ce qui a été ou qui va être développé en modélisation et optimisation dynamiques afin de pouvoir proposer plus rapidement des solutions logicielles complètes qui justifie la demande faite pour un poste d’ingénieur recherche numérique.

 

[1] EDENE, EuropeanDoctoral Programme in Energy and Environment, porté par l'UPPA et co-financé dans le cadre des actions Marie-Sklodovska-Curie COFUND du programme Horizon H2020 de la Commission Européenne.